"Spider-man into the spider-verse" avait tout du projet ultra casse-gueule, et pourtant à l'arrivée, on se retrouve avec une des meilleures adaptations du Tisseur, si on excepte la trilogie incroyable de Sam Raimi, malgré les légers défauts qui la traversent.
Annoncé fut un temps avec Chris Lord, et Phil Miller aux manettes, les géniaux réalisateurs de "la Grande Aventure Lego", mais aussi des sous-estimés "Tempêtes de boulettes géantes 1 et 2", et des sympathiques films méta que sont "21 Jump Street" et sa suite "22 Jump Street", le projet même si il est resté dans les mains productives et narratives de Lord, a finalement échu à non pas, un ni deux mais bien trois réalisateurs différents. Et même si deux d'entre eux, ont fait leurs premières armes de réalisateurs sur ce film, le dernier a commis le génialissime "Les 5 Légendes".
Ainsi, outre donc, Peter Ramsay, le créateur génial du film "les 5 légendes", produit par Guillermo del Toro d'ailleurs, on retrouve deux noms quasi inconnus, à part de spécialistes d'animations ultra pointus, car le premier, Bob Persichetti a été animateur de quelques Disney, ainsi que sur le récent "Le Petit Prince", tandis que le second Rodney Rothman a été le scénariste de 22 Jump Street du duo Chris Lord et Phil Miller, et scénariste sur ce film, avant de réaliser le futur spin-off entièrement féminin de la série "24 Jump Street" (mais où est passé le 23 ?)
Ce travail à six mains est tout simplement époustouflant, jamais une aventure de Spider-man n'aura été autant cinégénique, cinétique et émotionnellement et formellement si forte. Depuis on le répète, la trilogie de Raimi, qui reste pour votre serviteur en tout cas, indépassable.
Le scénario de Chris Lord et Rodney Rothman convoque intelligemment plusieurs versions de Spider-man. Un jeune garçon afro-latino américain (afro américain par son père et latino américain par sa mère), Miles Morales se fait mordre par une araignée radioactive échappée d'un univers parallèle et récolte les pouvoirs de spider-man. Il essaie de faire comme son idole, et finit par le trouver alors que ce dernier est au prise avec le Caïd (Kingpin). Ce dernier finit par piéger Spider-man, et le tuer sous les yeux de Miles.
Après la mort de Spider-man, tué par le Caïd, Miles décide de devenir Spider-man à son tour, et entreprend de créer son propre mythe. Il achète un déguisement de spider-man, vendu par Stan Lee en personne, qui lui assure que le costume lui siéra parfaitement et que la maison ne rembourse ni n'échange les costumes. Par cette simple idée narrative méta, mais profondément intelligente tant elle reste connectée à la mythologie de Spider-man, le ton est donné.
Spider-man into the spider-verse est un grand film postmoderne, un blockbuster intelligent, dont la réalisation renvoie sans arrêt au comics. Autre point méta amusant, avant de devenir Spider-man, Miles a une narration et un découpage de plans tout à fait normal, pour un film, qui pourrait s'apparenter à une comédie dramatique. Mais dès le moment où Miles devient Spider-man, l'univers graphique et réalisationnel se modèle autour du comics, une voix off intérieure de Miles apparaît, des onomatopées de coup et de pensée se matérialisent sous forme de bulle ou de carton, et la réalisation devient encore plus virtuose.
Le film passe par une partie tribute à Sam Raimi, très clairement mais en réinventant chacune des scènes qu'il décrit. Sans trop dévoiler l'intrigue pour celleux qui voudraient voir le film, le Caïd déclenche une perturbation du continum espace et temps, et notre terre, la terre des comics Marvel, Terre-616 se voit envahie par des version alternatives des comics spider-man, d'où le titre.
On se retrouve donc avec pas moins de 5 versions alternatives.
-Une version manga avec une petite fille et son robot, Péni Parker.
-une version film noir avec un Peter Parker plus violent, dont l'histoire se passe pendant la prohibition, évoquant autant les premiers Batman que The Spirit ou Sin City de Miller. Spider-Man Noir n'est autre que la transposition des comics Spider-Man dans l'âge Noir (les années 1930). Ce personnage apparaît en 2009.
- une version dessin animé avec Spider-Ham (Spider Cochon, le fameux, du dessin animé les Simpsons, évoqué par Homer dans le film), transfuge des Looney Tunes, et tiré de réels comics, parodie de Spider-man ayant existé dans les années 1983. Le personnage a fait sa première apparition dans le comics intitulé "Marvel Tails Starring Peter Porker, the Spectacular Spider-Ham #1" en 1983 qui sera suivi par 17 volumes. L'histoire est totalement loufoque, puisque Peter est ici une araignée qui se fait mordre par une scientifique devenu folle, May Porker. "Peter est une araignée qui vit dans le sous-sol d'une scientifique folle nommée May Porker. Elle réalise des expériences dans le but de révolutionner l'industrie du cheveux ! Elle a créé le premier sèche-cheveux atomique. C'est en séchant ses cheveux justement qu'elle sera accidentellement irradiée et qu'elle va mordre Peter l’araignée... C'est ainsi qu'il deviendra "Spider-ham" !"
-une version où Spider-man est une fille, Gwen Stacy, mordue par une araignée radioactive et ayant développé les pouvoirs à la place de Peter, son meilleur ami. Personnage de Spider-Gwen, tiré de comics paru en 2015, édité par Marvel, sans doute pour surfer sur les nouvelles revendications féministes en terme de personnage.
et enfin, une version alternative de Peter Parker, qui est plus vieux, et dont l'histoire sentimentale autant que familiale n'a pas tourné pareil.
Tous ces personnages se trouvent face à un grave problème, les agissements du Caïd ont un effet sur leurs multivers et si chacun n'a pas réintégré son univers respectif très vite, il sera rayé de la carte. Commence alors une course contre la montre et contre le Caïd.
Spider-man into the spider-verse est incroyable, dans tout, sa narration, son montage, sa musique signée Pemberton, son découpage technique ou ses idées de mise en scène ou symboliques.
La meilleure façon de lui rendre hommage est de voir ce film, et trop en parler, gâcherait de beaucoup le plaisir de la découverte. Sachez juste qu'on retrouve beaucoup d'éléments de spider-man, ainsi que bons nombres de personnages secondaires et antagonistes de l'univers du Tisseur.
A savoir que Miles Morales est lui aussi tiré d'un vrai comics, paru en 2011, dessiné par Brian M'Bendis et Sara Pichelli dans les pages de Ultimate. Au final, ces incessants aller retour entre film meta et film premier degré aurait pu décevoir ou être raté, mais il n'en est rien, tant le scénario est précis, et tant la structure du film ne tombe jamais dans la blague facile ou dans le désamorçage d'émotion, à une ou deux exceptions près. Un film incroyable, à voir au moins une fois, tant l'entreprise tient du pari fou. Et comme disait Stan Lee à qui le film est en parti dédié, "That person who helps others simply because it should or must be done, and because it is the right thing to do, is indeed without any doubt, a real superhero".
LA 3D apporte une réel plus au découpage, et à la cinégénie des plans des réalisateurs. Au niveau des défauts rares du film, on regrettera juste quelques passages idéologiques un brin appuyé mais sans que cela ne soit pour autant un frein au plaisir et à l'émotion qu'on éprouve à la vision du film.
Au niveau des bonus, on retrouve un commentaire audio des réalisateurs, différentes scènes alternatives qui apporte un peu plus de densité encore au personnages, le tout commenté par les réalisateurs. Mais aussi un court-métrage inédit "Spider-Cochon : pris pour un jambon" de Miguel Jiron. Un hommage à Stan Lee et Steve Ditko, les créateurs de Spider-man qui nous ont quitté récemment, respectivement en Novembre 2018 et Juin 2018. Un documentaire sur les voix du film, et des featurettes à l'intérêt divers.
En Blu-Ray, Blu-Ray 3D, Blu-Ray 4K Ultra HD, DVD, Editions spéciales et VOD depuis le 6 mai 2019, et en Achat digital depuis le 29 avril 2019. Edité par Sony Pictures France. Le site et la page Facebook de l'éditeur.