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17 février 2015 2 17 /02 /février /2015 08:38

http://modern-technology.pl/wp-content/uploads/2013/04/imagine-2013.jpgAndrzej Jakimowski n'est pas ce que l'on pourrait à proprement parler un réalisateur grand public. Il est fort probable que son nom n'évoque rien à la plupart des gens, voire même des cinéphiles, votre serviteur inclus. Aucun de ses films n'aura véritablement d'impact sur votre vie, et pourtant, Imagine, son dernier film tourné en 2011, sortie en 2013 et édité seulement ces derniers temps en bluray et dvd pourrait fort bien changer la donne.

Moi-même je n'aurai sans doute jamais été attiré de prime abord par ce film polono-franco-anglo portuguais si je n'avais pas eu un jour un accident à l'oeil qui aurait pu avoir pour conséquence de me laisser borgne comme John Ford, Fritz Lang, Raoul Walsh, etc.... C'est ce qui m'a donné envie de m'intéresser à ce film dans la sélection cinetrafic car sans ça, je ne pense pas que je lui aurais donné une chance. Et force est de constater que j'ai bien fait car j'ai découvert un vrai bijou, rempli d'onirisme et de poésie, servi par un sens du cadre et de la rupture assez évident et un travail sur la lumière de toute beauté.

L'histoire raconte le parcours d'un éducateur aveugle, Ian (impeccable Edward Hogg) embauché par une modeste institution portuguaise pour aveugles, principalement des enfants et des adolescents. Mais la particularité de Ian c'est de ne jamais se déplacer avec une canne, mais en utilisant l'écholocation, comme les chauve-souris ou Daredevil (parenthèse ouverte, Edward Hogg serait le candidat parfait pour un remake/reboot du démon masqué, car il possède un charisme indéniable et une belle palette d'émotions qui conviendrait parfaitement pour Matt Murdock et son alter ego à cornes fin de parenthèse).

Ian s'évertue donc à contrer l'institution qui lui réclame de faire ses cours encadré par du personnel voyant et surtout sans se départir de sa canne blanche, et il entraîne les enfants sur la voie de l'accès au monde réel autrement. La kyrielle de jeunes comédiens non professionnel est impeccable de justesse, et la présence de comédiens pros comme Edward Hoog, Alexandra Maria Lara ou Melchior Derouet ne fait que renforcer ce sentiment d'osmose. La méthode d'Ian n'est pas sans risque, puisqu'il se blesse plusieurs fois mais au moins il ne vit pas sa vie à genou. Petit à petit, un léger vent de révolte souffle sur l'institution et les enfants d'abord méfiants finissent par faire confiance à son sens aigu de la liberté.

En particulier un jeune homme, Serrano (Melchior Derouet épatant) qui remet en cause son mentor, et va jusqu'à douter de ses enseignements jusqu'à ce que ce dernier ne l'entraîne sur ses traces, et le guidant dans la ville sans canne blanche lui fasse "ouvrir les yeux". Ian va aussi mettre sur la voie, Eva (Alexandra Maria Lara, déjà remarqué dans Rush, dans le rôle de la Marlene Lauda la femme de Nikki), jeune adulte aveugle qui ne sort plus de l'institut même avec sa canne tellement le regard des autres sur sa condition la fait souffrir. Au contact de Ian, la jeune Eva va quitter le jardin d'Eden, pour se confronter à nouveau à la réalité du monde, à sa beauté et aussi à sa souffrance.

Ian agit ainsi comme un véritable révélateur pour tout ses "patients" et finit par s'attirer les foudres du directeur de l'institut, Francis Frappat qui compose un méchant de la vraie vie, c'est à dire ni trop ni trop peu, jamais dans la caricature mais qu'on écouterait presque parce qu'il n'est jamais manichéen, juste peu à l'écoute de l'évolution du monde et de ses techniques. Je ne raconterai pas la fin, parce que le but de cette critique est de vous faire voir le film, mais sachez que si vous aimez les happy end, passez votre chemin.

Entre le récit initiatique, et le cercle des poètes disparus, Andrzej Jakimowski réussit le tour de force de produire un film lent, poétique, et dans lequel on ne s'ennuit jamais. Et comble de tout, lorsque le générique final apparait, on regrette la durée, tellement on aurait aimé vivre plusieurs vies avec ces jeunes aveugles. Le film est d'ailleurs dédié à la mémoire de Ben Underwood, jeune aveugle afro-américain utilisant l'écholocation et décédé en 2009 à l'âge de 17 ans. 

https://www.youtube.com/watch?v=AiBeLoB6CKE

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