Ceux qui me lisent depuis quelques temps déjà, savent que même si je ne crache pas sur un film asiatique ou deux, je ne suis pas ce qu'on pourrait appeler un afficionado, donc toutes mes excuses si je dis des conneries ou que je froisse des sensibilités.
Le film asiatique d'aujourd'hui est un film du réalisateur chinois Johnnie To dont je n'ai vu et je m'en excuse, aucun de ses films. Ceci étant, vu la découverte qu'a été celui-là, ça risque probablement de changer dans les mois à venir. Attention quand même, je connais son nom, et j'ai déjà entendu parler de ses films, même de loin. PTU, Election, ou le récent Vengeance avec Johnny Halliday, mais je ne les ai jamais vu.
J'en profiterais donc pour commencer par un petit point culture sur Johnnie To "Johnnie To est engagé à 17 ans comme assistant administratif pour une des principales chaînes de télévision de l'ancienne colonie britannique, la TVB. Quelques années plus tard, il produit des séries, toujours pour le petit écran. En 1980, il passe le cap de la réalisation en tournant The Enigmatic case, un film d'aventure médiéval qui ne connaît aucun succès. Après six ans de travail sur des séries télés, il tourne en 1986 Happy Ghost 3, son second long métrage." (source : allociné)
Drug War donc qui date de 2012 mais qui n'est sorti en dvd et bluray en France que cet été raconte sur fond de guerre des gangs, la traque d'un policier des stups chinois envers un dealer chinois lui aussi. Et inutile de le dire mais on va quand même le dire, on est loin de Julie Lescaut ^^. Et loin du cinéma américain d'action aussi avec ces héros qui s'en sortent tous en tuant les méchants. Là c'est beaucoup plus ambigue, beaucoup plus fin.
Le film s'ouvre sur une scène en apparence what the fuck mais qui a pourtant tout à voir avec l'histoire qui nous occupe. Une voiture dont le passager semble être en proie à une overdose (ou alors il conduit vraiment trés trés mal) fait de grand zig-zag sur une route commerçante d'une ville avant de finir par s'emplafonner dans un restaurant chinois. Noir. On se retrouve dans un camion qui roule sur une autoroute avec deux chauffeurs chinois, et deux hommes qui les suivent en voiture dans ce qui semble être une filature de stups. Puis retour à l'homme de la première voiture qui est hospitalisé. Il tente de s'enfuir mais la police le rattrape. Il s'agit d'un trafiquant de drogue, Choi Min, impeccablement campé par Louis Koo, véritable MacBeth du film. Le commissaire Zhang (Honglei Sun) lui rappelle qu'il est coupable d'avoir fabriqué et dealé des tonnes d'amphétamines et que pour seulement avoir produit 50 grammes, on est condamné à mort en Chine. Ce dernier veut se racheter, et ne voulant pas mourir, propose au commissaire de lui livrer ses principaux acheteurs, et les responsables de la plaque tournante du trafic. Zhang a contrecoeur accepte, et rencontre le dénommé Hoho en se faisant passer pour Chang, bras droit de Oncle Bill, le chef de la mafia. Bill conclue le deal avec celui qu'il croit être Chang, puis part vaquer à ses affaires, pendant que Zhang qui a enregistré toute la conversation avec son équipe de policier en sous-marin dans une chambre voisine de l'hôtel de la rencontre, prend la place de Hoho pour rencontrer le véritable Chang. On se retrouve donc tour à tour dans un suspens à couper au couteau, puis dans du vaudeville pratiquement, et le réalisateur gère trés habilement le passage de l'un à l'autre. Chang apporte de l'héroïne pure en cadeau à Hoho, ou du moins celui qu'il croit être Hoho, et Zhang n'a d'autre solution que de "sniffer" le rail de bienvenue, puis celui offert par Oncle Bill. Chang propose un troisième rail mais Choi Min lui tape sur le bras, lui signifiant que les "cadeaux" consécutifs risque de tuer Hoho qui ne prend pas de sa propre drogue, même si il en vend. Chang s'en va et Zhang, manque de mourir d'une overdose. C'est Choi Min qui le sauve en lui ordonnant de prendre un bain glacé, de boire de l'eau,et de vomir. Zhang a une dette envers Choi Min qui lui a sauvé la vie. Choi Min passe à son entrepot secondaire (toujours surveillé en sous-marin par Zhang et ses hommes) avec le vrai Hoho et sa femme et apprend à ses employés muets que sa femme à lui et ses deux frères sont morts dans l'explosion d'un autre entrepot. Il semble trés ému et n'a pas eu le temps de leur rendre honneur. Les muets décident de brûler des billets de banque pour remplacer le cérémonial de l'encens. Zhang et son équipe interviennent et capture le vrai Hoho, sa femme, et manque de capturer les mulets mais deux s'échappe en tuant plusieurs policiers. Choi remplit son camion de drogue et se rend, toujours accompagné de Zhang qui se fait passer pour Hoho au rendez-vous avec Oncle Bill. Choi Min lui apprend que Oncle Bill n'est qu'une couverture et que le trafic est en fait géré par 7 personnes différentes. Oncle Bill et Chang méfiants, demandent à Hoho (ou du moins le croit-il) de faire partir certains de ses bateaux, puis tous ses bateaux comme preuve que les navires sont bien à lui. Zhang s'exécute, aidé de ses policiers des stups qui sont à bord de chacun des bateaux.
A ce moment du film, on bascule presque dans du Meville, ou du Michael Mann, la poésie qui se dégage de ce "lâcher de bateau" est sublime. Bien évidemment, mon but est de vous donner envie de voir le film, donc je n'en révèlerais pas la fin, mais c'est un film policier, viscéral, âpre, avec de trés belles scènes poétiques, voire même drôles, qui sont immédiatement suivies de scènes d'une grande violence, ou de manipulation, voilà pourquoi ce film m'évoque fortement le théâtre du grand William Shakespeare, écrivain qui savait à merveille passer d'un genre à l'autre, dans un claquement de doigt, ici un claquement de feu.
Un petit mot à rajouter sur la musique qui est celle d'un français, Xavier Jamaux, un habitué des productions asiatiques, et qui correspond parfaitement à ce qui se passe à l'image. Le thème du film est lancinant et triste mais dépeint parfaitement l'atmosphère voulue par le réalisateur.
BONUS : Les bonus du bluray sont plutôt chiches, puisque outre quelques bande-annonces, il n'y a qu'une simple featurette en guise de "coulisses du tournage" à se mettre sous la dent. On aurait apprécié pour un tel film, quelque chose de plus conséquent comme un commentaire audio ou un making of fourni, (ne serait-ce que pour décortiquer les nombreuses séquences de fusillades, admirablement gérée).
Enfin, ce n'est pas cette pauvreté de bonus qui va vous empêcher de découvrir cet excellent film, dont on se demande d'ailleurs pourquoi il n'est jamais sorti en France. Car du direct to dvd ou bluray de cette qualité, on en demanderait bien plus souvent.
Sortie en dvd et Bluray le 18 Juin 2014. Distribué par la Metropolitan Filmexport.
Retrouvez sur Cinetrafic ce film et bien d'autres films dans la catégorie - film policier 2014 et films d'action.