On aurait pu penser que tout avait été dit dans les précédents opus de Toy Story, et que le magnifique et très émouvant 3eme opus, fermait la porte de la plus belle des manières. Mais force est de constater que même si loin d'atteindre la force d'évocation immédiate et intemporelle de Toy Story 3, Toy Story 4 ne démérite pas et arrive à trouver sa place moins en tant que suite directe (ce qu'il est pourtant) que comme spin-off pour raconter l'histoire de Bonnie, mais surtout et la surprise est là, l'histoire de Bo, la bergère au mouton à 3 têtes des deux premiers volumes.
On retrouve bien entendu, tous les personnages qui font le sel de la série de films, de Mr et Mme Patate, à Rex, en passant par le tricératops femelle Trixie, ZigZag, et bien d'autres. Auquel s'adjoint Jessie et Buzz, bien que ces derniers soient plus des "figurants" qu'autre chose, et ce même si Buzz aura son rôle à jouer plus loin dans l'intrigue.
On retrouve donc la petite Bonnie qui va rentrer à la maternelle, et qui angoisse à cette idée, car les jouets sont interdits. Et là le ciel s'effondre sur la tête de la petite fille. D'autant plus que de son côté, Woody est délaissé dans son rôle de Shérif au profit de Jessie. Il récolte même son premier "mouton de poussière", témoin d'un désintérêt d'un enfant pour son jouet.
Mais Woody, malgré le fait que Bonnie le délaisse, ne veut pas tourner la page pour autant, et profitant d'un moment d'inattention des autres jouets, il s'enferme dans le sac de Bonnie. Arrivé à l'école, Bonnie tente de nouer le contact avec un petit garçon, mais ce dernier l'ignore, et elle recommence à broyer du noir. Jusqu'à ce que Woody, en fouillant les poubelles ne lui donnent à s'occuper. Et c'est à l 'école, avec des matériaux de récupération dans la poubelle que lui a discrètement suggéré Woody qu'elle se crée son premier jouet "DIY" (Do It Yourself), Fork, une cuichette (mi fourchette, mi cuillère).
Par le pouvoir de l'imagination de Bonnie, Fourchette prend instantanément vie, et Woody, Fourchette et Bonnie rentrent de l'école. Arrivé dans la chambre de Bonnie, le petit dernier, s'intègre mal et ne rêve que d'une chose, finir littéralement dans une poubelle. Il finit par déjouer la surveillance accrue de Woody et profitant d'une bourrasque, il s'envole loin des autres jouets.
Woody ne sait plus que faire, et profitant du fait que la famille part en vacances en camping car (l'école ne reprenant que dans une semaine), il s'évade bien décidé à retrouver Fourchette et à le ramener coûte que coûte.
Fini, les thématiques sur l'importance de grandir, sur le fait qu'un jouet risque d'être supplanté par un jouet plus technologique, ou tout simplement sur la perte d'un jouet de grande valeur sentimentale, ici Toy Story 4, célèbre l'attachement pour du jouet DIY. Le même attachement qu'on peut avoir pour un doudou en mouchoir de maman ou en chiffon, ou encore pour les fameux chevaliers en marrons de marronier. Tout le discours du film s'articule donc autour de la notion de conscience. Conscience de ne pas être un jouet (tout l'inverse de la thématique du 2), conscience qu'un jouet doit être fonctionnel pour plaire à un enfant, ou encore à la fin du film, conscience d'être.
Sur un scénario écrit par Andrew Stanton, et Stéphany Folsom (aidé de pas moins de 5 scénaristes supplémentaires) on trouve à la réalisation, un petit nouveau, qui était un ancien storyboarder de Cars 2, Josh Cooley. Et le moins qu'on puisse dire c'est que Josh Cooley a du talent créatif à revendre, et une imagination assez débordante visuellement. Et même si il lui manque peut-être le génie de ses pairs, ses premiers pas dans le long sont plus qu'encourageant pour la suite.
Il arrive tour à tour à distiller savamment, l'émotion ( le prologue et l'épilogue), le rire (les interventions sporadiques et plutôt bien dosées de deux personnages sidekick), la peur (les passages dans le magasin d'une vieille antiquaire, à commencer par un superbe clin d'oeil à Shining), et même la réflexion philosophique, tout le long de son métrage.
Toy Story 4 est un film plus adulte, plus centré autour de l'émancipation de Bo donnant une tonalité féministe très appréciable car parfaitement intégrée à la trame narrative du film, et pas catapulté là pour faire "genre", après sa déchirante séparation d'avec Woody et Molly, ainsi qu'une réflexion plutôt poussée sur l'estime de soi, suivre sa voix intérieure (plusieurs personnages sont confrontés à une voix interne : une poupée a son mécanisme vocal comme celui de Woody mais défectueux, Bo a sans arrêt une sorte de polly pocket sur l'épaule, façon Jimini Cricket, un hilarant motard acrobate Canadien interprété par Keanu Reeves ne cesse de penser à son ancien enfant "Jeanjean" qui l'a délaissé car il n'arrivait pas à sauter aussi loin que ce que le vantait la publicité du jouet, et même Buzz qui avec une certaine synchronicité fait correspondre ses commandes vocales avec des questionnements moraux liés à l'action qu'il veut entreprendre pour sauver Woody, et Fourchette, et les ramener à bon port.
La musique de Randy Newman toujours égal à lui-même, est pour partie dans le côté émotionnel du film, et deux nouvelles chansons de Charlélie Couture finissent d'enfoncer le clou de la nostalgie. Mais malgré ça, le film en lui-même court vers l'avant, et ne regarde presque jamais derrière lui de manière compassée.
Le final du film est à la fois terriblement déchirant et parfait en soi, et le film se termine sur un effet de boucle bouclée avec en plus une question d'un nouvel arrivant après le passage de Bonnie au CP qui ouvre justement à d'autres aspiraitons, Fourchette représentant la partie d'elle-même qui était en questionnement sur son "utilité" sur terre, et son sentiment de ne pas être un jouet, mais un déchet. Et ce nouvel arrivant, coïncide avec son évolution psychologique d'enfant et les questionnements qui s'y retrouvent liés. Je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler un des passages les plus intéressants du film.
Bonus : Du côté des bonus, le Bluray du film déborde à ras bord : scènes coupées en storyboard animés, visite des studios et de la partie doublage juste hilarante, commentaire audio, bandes annonces et courtes featurettes vraiment intéressante. Pixar ne s'est pas moqué de son public encore une fois.