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30 juin 2018 6 30 /06 /juin /2018 17:20
Over look Hotel : Rise of a Boogeyman

C'est l'histoire de Jack T. joué par Jack Nicholson, qui devient fou, ou bien est-ce l'inverse Jack N. joué par Jack Torrance qui devient sage, on est plus trés sûr... Mais c'est surtout et avant tout le nouveau mashup du petit génie Antonio Mario Da Silva, qu'on ne présente plus et qui a eu pas loin de 4 articles de fond (si on compte ce dernier) consacré à ses mashups en ces pages.

Ce nouveau mashup cauchemar prend vie dans l'Overlook Hotel de Shining, bien après les évènements qui ont secoué le lieu, le corps de Jack Torrance n'a jamais été retrouvé, tandis que Danny et Wendy vivent heureux ensemble ailleurs. L'histoire débute avec la voix off de Jack, qui explique qu'il vit dans l'overlook avec ses fantômes, et qu'il se débrouille trés bien. L'écriture de son nouveau roman avance à grand pas, et lui-même ne sait plus au juste si il est mort ou vivant.

A travers cette figure, ce monument du film d'horreur, l'hôtel n'est qu'un prétexte pour le prodige du mashup qu'est Antonio Maria Da Silva (AMDS pour les intimes) pour interroger le mythe même de l'horreur au cinéma, allusion à double sens (un ballon rouge par exemple qui renvoit tout autant au CA du maître King, qu'au premier "Jack" de l'histoire du cinéma, M le Maudit de Fritz Lang). Aussi bien que peut-être au film sur l'enfance, le ballon rouge, moyen métrage français d'Albert Morisse, réalisé en 1956, pas un film d'horreur à proprement parler, mais un film "fantastique" dans lequel un ballon rouge énorme, symbole d'enfance suit un petit enfant tout le long du film. Il semble que le symbole soit le même dans ce nouveau projet d'AMDS.

Le film original avait même inspiré une sequel dans laquelle le ballon rouge revient s'occuper des méchants gamins qui l'avait crevé dans le premier film, court-métrage trés drôle. https://www.youtube.com/watch?v=dcl1K3qzvvE

L'obsession (c'est le mot parfait) avec laquelle le ballon revient méthodiquement de multiples fois dans le métrage, semble corroborer cette thèse plus qu'un hommage évidemment aussi évident au CA du maître. Car l'hommage à King est présent de bout en bout, et comment ne pas faire plus bel hommage schizophrénique qu'en reprenant précisément le film le plus haï de l'auteur, qui ira jusqu'à refaire un tvfilm plus fidèle à l'oeuvre qu'il estime (et à juste titre d'un point de vue fidélité) bafouée par Kubrick. On retrouve ainsi pèle-mêle, plusieurs clins d'oeil à l'oeuvre du King de l'horreur, qui sont d'ailleurs autant de références cinématographiques (Shining bien évidemment, mais aussi Misery, Cujo, Christine, IT, Carrie). Mais pas seulement, puisque AMDS allongent le bal des références à tout le cinéma d'horreur, transcendant les nationalités (on trouve Ringu), les générations (remake et original s'ébattant joyeusement) et les genres (slasher, fantastique, horreur, etc...)

L'artiste qu'est AMDS va jusqu'à reprendre quelques photogrammes parmi les plus icôniques du film de Steven Spielberg, Ready Player One, le seul par ailleurs non crédité au générique, dans le passage le plus marquant d'ailleurs qui puisse parler de la création, et de l'héritage qu'on peut faire des anciens, la scène de "mise à mort" de Shining justement.

Mais l'intelligence du joli projet ne s'arrête pas là, car non content de rendre ainsi hommage à Kubrick, et King, AMDS nous offre même un mashup d'une évidence folle (au point qu'on se demande pourquoi personne n'y a pensé avant tant le raccord "idéologique" fonctionne) puisqu'il offre à son narrateur Jack, rien moins que le plaisir de s'inviter et de réinventer de multiples fois d'ailleurs, la scène charnière du cinéma de Hitchcock, scène qui traumatisera bon nombre d'apprenti réal dont votre serviteur, et de réal chevronnés parmi lesquels  Brian de Palma qui en fera la figure maîtresse d'une grande partie de ses films, au point d'en rejouer les enjeux et la rythmique, un peu partout, notamment dans un ascenseur.

C'est ainsi que Jack Torrance tue la voleuse Marion Crane dans une sarabande endiablée qui rappelle par son déroulé, le film un jour sans fin, le tout, avant de littéralement avoir une conversation avec des soi plus jeunes, plus psychotiques, plus âgées ou plus sage de lui-même.

Comme toujours chez AMDS, les correspondances visuelles priment sur le tout, et on ne compte plus les fondus enchaînés, ou raccord mouvement, raccord regard de grand talent, aussi puissamment évocateur que brillamment pensé. Mais pour une fois, le récit se fait aussi oral, à travers l'idée bigrement intelligente d'un narrateur de fiction omniscient, omnipotent dont le timbre est à si méprendre trés proche de l'état d'esprit du Jack Torrance original. Au point qu'au début on doute un peu si le texte est original ou si il est lui aussi mashupé avec différentes interventions de Nicholson dans différents films, mais le générique et certaines lignes de dialogue sont sans appel, il s'agit bien d'un voice over original.

Sur les thématiques, celles qui surnagent le plus est sur les affres de la création que tout créateur peut subir quand il essaie de créer, et je pense sans me tromper, qu'il y a une part d'autobiographie dans ce sentiment que nous dépeint Antonio dans son mashup.

On trouve également dans les thèmes traités, le rapport à l'enfance, dans la dimension mythologique du roman, puisque le récit original parle notamment de "boogeyman", et vraisemblablement d'abus sexuel de la part de Jack sur son fils comme semble le suggérer assez finement la scène de l'ours que Wendy voit en déambulant dans l'hôtel dans le film original. Et l'idée de fin est puissamment brillante, car elle reconnecte le mythe avec son vecteur (la relation monstre-victimes, puisque pour qu'un monstre existe, il faut qu'il existe une ou des victimes pour lui offrir son statut de monstre), tout en faisant une transition intelligente et moderne que n'aurait pas renié, un film comme la Cabane dans les Bois.

Encore une fois, Antonio Mario Da Silva, que l'on suit toujours avec plaisir, nous offre du trés grand art, quasiment une création originale n'ayons pas peur des mots, du moins autant que ne l'est la scène de Shining dans RPO, une re-vision à l'aune d'une thématique donnée, après tout que ce soit un monstre ou un artiste, c'est aussi ça la "création".

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