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4 avril 2022 1 04 /04 /avril /2022 13:19
Cry Macho

Avec son tout dernier film, Cry Macho, Clint Eastwood constate le deuil de l'homme viril. Ecographie d'une époque révolue.
Clint Eastwood a souvent été décrit comme un fasciste, ou un mec d'extrême-droite par des publics souvent incultes ou qui n'a jamais vu un seul de ses films réellement et ne se basait que sur certaines déclarations publiques d'ordre politique.
Mais contrairement à ce qu'un vain peuple pourrait penser, le cinéma de Clint Eastwood n'est pas la pensée de l'électeur Eastwood. Et son cinéma a toujours été bien plus complexe, et recherché qu'un tract du parti Républicain.

C'était déjà le cas de ses précédents, la Mule (qui voyait le personnage de Eastwood confronté au progressisme américain), ou le Cas Richard Jewell qui dépeignait un certain nombre de femmes fortes, qu'elles soit positives comme la mère de Richard ou négative comme la journaliste Kathy Scruggs.

Ici, dans Cry Macho, Clint Eastwood se met en scène dans le rôle de Mike Milo, un cow-boy au chômage, star déchu du rodéo, privé de son art par une blessure au dos, et privé de sa femme et de son fils par un accident de voiture, qui va se voir confier une mission totalement aberrante par son ex patron et quelque peu ami (il lui a sauvé la mise quand il était au plus bas), partir au Mexique en voiture, et ramener le fils de son ex patron, Rafa, un gamin paumé de 14 ans, des mains de sa mère, une personne plutôt toxique.

Cry Macho est un vieux projet de Easwtood, proposé à lui alors qu'il était encore un trop jeune réalisateur selon lui, il y a près de 50 ans, le vieux réalisateur de 91 ans cette année s'en empare, et les esprits chagrins diront qu'il est maintenant trop vieux pour le jouer, et le réaliser. Mais c'est mal connaître la destination de l'histoire. 

Mike Milo, l'alter ego de l'acteur (un cow-boy de rodéo star d'un temps, qui a été déchu, vous l'avez ?) va traverser le passé de Eastwood, être confronté à la tentation par la mère même de Rafa, une femme vénéneuse et un brin nymphomane dont il refusera les avances. Est-ce pour la raison suivante que cette dernière envoie ses hommes à sa poursuite, toujours est-il que Clint Eastwood n'est plus le héros qu'il a été jadis. Et ce Cry Macho est une longue et lente déconstruction de la virilité et de ce qu'elle représente, dans un monde qui appartient maintenant selon toute vraisemblance selon le réalisateur au progressisme US.

Pour symbole de la chose, le "Macho" est un coq qu'entraîne le jeune Rafa pour en faire un coq de combat. Allusion, double à "cock" (pénis) que Milo explicitera très clairement à Rafa, "si tu veux appeler ton "petit oiseau" (en VO "Cock") macho, ça te regarde". Mais le Macho, c'est aussi cette espèce de Némésis du personnage, jeune, beau, chevelu, l'amant de la mère de Rafa même, qui les poursuit dans sa voiture et qui tente d'enlever Rafa plusieurs fois.
Mike Milo se sait complètement dépassé, et nous ne sommes plus ni dans le fantastique Gran Torino, ou encore dans Sully, avec un héros fantôme mais héros quand même, ni une figure christique, non ici, c'est un spectre déjà un pied dans la tombe qui traîne sa carcasse sous forme de rédemption. La meilleure phrase qui résume le film est lorsque Rafa (dont l'acteur Eduardo Minett est vraiment très doué) et Mike qui officie dans le village mexicain comme "vétérinaire" d'appoint, sont confrontés à un chien dont la seule maladie est en réalité la vieillesse. Mike dira d'ailleurs, "je ne sais pas comment on soigne la vieillesse". Aveu d'un échec, autant que constat d'une réalité qui sous-tend le cinéma de l'acteur réalisateur. Brillante fulgurance qui résume parfaitement Cry Macho.

D'ailleurs, celui qui triomphera finalement de l'homme de main de  la mère de Rafa qui les poursuit impitoyablement, sera le "coq" Macho, ni Rafa, ni Mike, c'est dire le symbolisme. Et un revolver récupéré mais dont Mike n'usera pas. Si vous attendez un western pêchu, ou une semi comédie comme le Cas Richard Jewell ou la Mule, passez votre chemin. Pas de scènes d'actions, pas de chevauchées épiques (on se contentera de dresser les chevaux dans un coral), pas de gunfight endiablé, pas même de scènes de passions romantiques, et toute sexualité est annihilée avant d'avoir débuté. Tout juste une danse lente bien plus amicale que sensuelle sera esquissée avec la tenancière du bar qui recueille un temps le vieil homme et l'enfant.

Dans cette déconstruction lente et appliquée du western et de la notion de virilité, les chevaux des moteurs, remplace le cheval animal, même le stetson et l'habit typiquement "gringo" est abandonné pour se fondre dans l'univers Mexicain. Un voyage initiatique qui laisse perplexe, mais qui est loin d'être un mauvais film pour autant. Peut-être le dernier film de Eastwood, on ne l'espère pas, mais certainement pas le film de trop. 

Au niveau des bonus, le bluray propose deux making of intéressants, ainsi qu'un autre disque de près de 2h20 qui revient sur Clint Eastwood et tous ses films précédents, dans une passionnante rétrospective, indispensable pour les fans du réalisateur, et vraiment palpitante pour les autres. Merci à l'éditeur pour la version du commerce avec package du film, c'est toujours tellement rare, que quand le petit effort est fait, on se doit de le souligner. D'ailleurs, le film est aussi en 4K Ultra HD ce qui donne au roadmovie initiatique encore plus d'impact, par la profondeur de l'image, et la qualité du son.

En Blu-Ray 4K, Blu-Ray, DVD et VOD depuis le 16 mars 2022 Et en Achat digital depuis le 9 mars 2022. Edité par Warner Bros. Entertainment France. son site Internet, sa page Facebook et sa page Twitter. Retrouvez Cry Macho sur Cinetrafic : https://www.cinetrafic.fr/film/62083/cry-macho 

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