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20 juillet 2018 5 20 /07 /juillet /2018 08:40
La Forme de l'eau

Lorsque Guillermo del Toro, se décide à revenir à la réalisation, après le demi-succès de Pacific Rim, et la réussite critique,  mais un peu moins publique de son film gothique, Crimson Peak, c'est pour rendre hommage encore et toujours au cinéma des origines. 

Ainsi, dans ce nouveau film, Shape of Water, il rend hommage à la "Moman" des films de monstre, La créature du lac noir de Jack Arnold. Et cet aveu est tellement assumé, qu'il va jusqu'à singer l'esthétique physique du monstre. Certains ont parlé de référence également à la créature du marais de Wes Craven, mais ça parait quand même légèrement plus fantaisiste et rien ne vient réellement appuyer cette vision.

On ne rentrera pas non plus dans la polémique plagiat ou non de l'esthétique ou de l'histoire d'Amélie Poulain. Ce débat sur le plagiat de Jean-Pierre Jeunet n'a aucun intérêt cinématographiquement, cela ne fait que donner du sens à des sites "putaclic" ou à des journaux comme Closer ou Paris Match, nous préférons donner en ces lignes libre cours à l'intelligence visuelle, au talent narratif, etc... aux réalisateurs qui savent toucher le public, quel qu'il soit. Et si on commence là, alors on n'en a pas fini, de tous temps les récits précédents ont inspiré les suivants, et ainsi de suite. On se pignole sur les Fables de La Fontaine mais on oublie toujours que ce dernier a pompé les récits d'Esope qui lui-même avait largement plagié l'indien Pilpaï. 

Je prends cet exemple parce que c'est toujours le plus marquant à mon sens, et pas uniquement parce que c'est le seul que je connaisse. Car ce qui fait la spécificité d'une oeuvre au-delà de son récit, c'est ce qu'on y apporte, et ce qui y importe. Et la nationalité de l'oeuvre fait également pour beaucoup. Ainsi pour reprendre l'exemple des Fables. Pilpaï faisait surtout des récits simples et concis, Esope a apporté un certain développement dans les personnages, et La Fontaine a abouti le tout, en y ajoutant la dynamisation du récit (ce qui donnera plus tard le cinéma, notamment le dessin animé, mais ça il était loin de s'en douter) et une plus grosse importance à la morale. Dans un siècle profondément religieux, peu importe son niveau d'acceptation de l'influence de la religion, on est toujours quand même plus ou moins influencé, et ça a été le cas de Jean de la Fontaine.

Vous vous demandez sûrement où je veux en venir avec cette démonstration, d'autant plus que quelques lignes plus haut, j'avais dis que je ne voulais pas évoquer cette triviale affaire de plagiat. Mais ceci m'est nécessaire pour parler du film, car en bon La Fontainien, privilégiant les images dynamiques, aux longs discours, Guillermo del Toro réalise ici une fable moderne, le tout sous couvert d'hommages et d'évocations d'un passé presque révolu. Cette histoire en forme de la Belle et la Bête lui permet d'évoquer la réalité sordide à travers un onirisme des plus bienvenus. Il se retrouve donc à traiter de sujets très adultes, avec un postulat qui ne renierait pas sa place dans un conte de Grimm, ou de Perrault, ou un livre pour "enfant" comme Brisby et le Secret de NiMH par exemple. Ainsi, Guillermo en pleine période de #balancetonporc parle de féminisme, avec intelligence et légèreté, sans jamais être pesant, mais aussi de liberté au sens large, liberté d'aimer, liberté de jouir, liberté d'être différent (qu'on soit vieux, noir, ou gay), ceci incluant bien évidemment la liberté d'être un cornard, un manipulateur, un "violeur", d'être un espion simple, double ou triple, etc...

Ainsi, si les personnages du film agissent tels qu'ils le font, et pensent comme ils le font, c'est qu'ils sont plus des concepts, avant d'être réellement des "humains", et c'est ce qui peut paraître pour le moins déroutant. Ainsi l'impeccable Michael Shanon qui est l'illustration la plus parfaite de cette idée, est moins un salaud ordinaire que l'illustration de la vision capitaliste d'une époque.

Le film sans trop en dire mais pour vous donner envie de le regarder ne plaira certainement pas à tout le monde, mais il mérite son visionnage, ne serait-ce que pour savoir dans quel camp vous vous trouvez. Personnellement je suis dans un entre-deux, et ça fait déjà la deuxième fois qu'un film de Guillermo me laisse pantois sur ce que j'ai pu réellement ressentir. Alors que j'ai littéralement adoré à la folie ses précédents projets. Depuis Cronos son premier film, jusqu'à Pacific Rim, j'ai aimé tous ses films, à des degrés divers, mais là, je suis face à une énigme. Entre celui-ci et Crimson Peak, ça fait deux films que j'ai vu une seule fois mais qui m'ont un peu laissé en dehors de ce qu'ils proposent, et ça m'agace un peu je l'avoue. Sans doute faudrait-il que je les revoie à nouveau, car l'un comme l'autre, me semblent aborder plus des notions, des émotions et des sensations particulières que présenter réellement des personnages pour ce qu'ils sont.

Sortie en bluray et DVD depuis le 30 juin 2018. Edité par la 20th Century Fox. Retrouvez le site et la page Facebook de l'éditeur.
 
Retrouvez ce film, et bien d'autres encore dans les catégories romantisme et le meilleur du fantastique.
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